En Bolivie, la viol d’une fille de 10 ans par son directeur d’école a ranimé le débat public autour des violences sexuelles sur mineurs. La victime a été menacée et des proches de l’accusé ont essayé d’envahir un commissariat pour empêcher son arrestation.
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L’histoire a été révélée par la presse bolivienne il y a une semaine. Le directeur de l’école de la victime l’aurait arrêté alors qu’elle rentrait chez elle et l’aurait violée. Cela ferait suite à des semaines de harcèlement à l’école et via les réseaux sociaux, de la part de ce même directeur. La victime de 10 ans est tombée enceinte, les parents ont appris ce qu’il s’était passé et après avoir été saisi, la justice a demandé la détention préventive de l’accusé. C’est après cette demande de détention qu’une manifestation de soutien à l’accusé a été organisée. Les manifestants se sont retrouvés devant le commissariat de la ville pour faire pression sur la police et empêcher l’arrestation du suspect.
Culture de la violence sexuelle
Cette affaire est symptomatique d’une certaine culture de la violence sexuelle qui règne dans le pays. En Bolivie, une femme sur trois en a déjà été avant ses 18 ans. Le paie à l’un des taux les plus élevés de violences sexuelles en Amérique latine, mais aussi un des taux les plus bas de signalement pour ces crimes. Dans ce cas-ci, la justice a été rapidement saisie et pourtant cela n’a pas empêché la culpabilisation de la victime.
Si la fillette n’a que 10 ans, certains lui ont reproché d’avoir séduit et provoqué l’accusé. C’est ce qu’a déclaré Mónica Bayá, la directrice technique de la communauté des droits humains, une ONG bolivienne.
La Bolivie a également une législation particulière. Avoir une relation sexuelle avec un ou une mineure de 14 à 18 ans via du chantage, de la tromperie ou une position de pouvoir est appelé crime « d’estupro ». Ce terme espagnol désigne une notion légale différente du viol. Ce qui change entre les deux, c’est principalement la peine encourue qui va seulement de 3 à 6 ans de prison pour l’estupro contre minimum 15 ans pour une viole sur mineur. Et souvent les juges vont requalifier le viol en estupro pour réduire fortement la peine du condamné.
Projet de loi sur les crimes et délits sexuels
Depuis plusieurs mois, un projet de loi rendant les crimes et les délits sexuels sur mineurs imprescriptibles doit être votée au Parlement. Ce projet de loi pourrait faire changer les choses. Elle devait être votée en urgence après l’important scandale de pédocriminalité dans l’Église catholique bolivienne qui a été révélée au mois de mai.
Plus d’une dizaine de prêtres ont été mis en cause et à ce moment-là, toute la classe politique était d’accord sur l’importance de protéger les enfants du pays, mais depuis le projet de loi reste dans les cartons. Si elle est votée, cette loi serait sûrement une avancée. L’imprescriptibilité laisse le temps qu’il faut aux victimes avant qu’elles se décident à parler et aller voir la justice.
Après, cela restait insuffisant pour de nombreuses organisations travaillant sur le thème des violences sexuelles. Pour elles, il y a notamment un manque important de moyens financiers et humains de la part de l’État pour pouvoir faire plus de prévention. C’est-à-dire intervenir dans des écoles, avoir aussi des postes de psychologues scolaires qui peuvent repérer des cas comme celui-ci de cette fille de 10 ans. Sans ces moyens supplémentaires, cette culture de la violence sexuelle en Bolivie n’est pas près de changer.
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